Sous la burqa, l'intolérance française

Eternel débat sur le voile, éternelle hypocrisie française :

On prétend vouloir (comme ça, d'un coup) « protéger » les pauvres femmes musulmanes oppressées par leur mari.

Bon. Et si on laissait un peu les gens vivre ? Jusqu'où ira le pouvoir dans le règlement de nos vies ?

Le fond de l'affaire est aussi simple qu'inavoué : en France, on n'aime pas trop la religion en général et l'islam en particulier.

Ces polémiques et les éventuelles lois qui en découlent sont l'expression de l'intolérance française sous sa forme la plus détestable (c'est ce qu'on appelle, en langage politiquement correct, l'« intégration », ce fameux concept qui ne veut rien dire du tout, et qui se traduit par une politique qui entraîne l'exact opposé de ce qui est visé sous ce mot).

Lutter contre l'oppression de la femme, évidemment, nous sommes tous d'accord pour ce bel objectif. Mais est-ce vraiment le moyen d'y parvenir ? L'interdiction du voile à l'école a simplement mené à la création d'écoles musulmanes et à un sentiment de rejet. (Encore un bel exemple d'intégration !)

Allez voir un Américain ou un Anglais et essayez de lui expliquer au nom de quoi, diable, on interdit le voile ou la burqa.

Dans ce genre de cas on a honte d'« être français » (pour autant que cette expression ait un sens) face aux peuples et cultures qui se sentent incompris ou rejetés.

Il est singulier que tout cela arrive dans le pays de Voltaire. Mais précisément : il faut comprendre qu'ici comme ailleurs les grandes expressions idéologiques naissent dans des pays où règnent les conditions inverses : les Pays-Bas ont eu Spinoza pour défendre la liberté d'expression à l'époque où cette liberté y était extrêmement menacée ; la France a eu Voltaire pour la tolérance et Montesquieu pour la séparation des pouvoirs, car ce sont deux choses dont les Français ont toujours été strictement incapables.

Qui coupe ne choisit pas

Enfant, il y avait cette règle simple pour se partager une banane :

QUI COUPE NE CHOISIT PAS.

Ô astuce ! Ainsi celui qui coupait s'efforçait de son mieux de faire deux parts rigoureusement égales : il savait bien que l'autre prendrait la plus grosse. Et si la banane était un peu pourrie d'un côté, il fallait en tenir compte de la manière la plus équitable possible pour ne pas se faire arnaquer ; car on aurait la pire part.

J'en tire une proposition constitutionnelle : les dirigeants auront la place du plus mal loti. Ainsi ils ne seront pas tentés d'admettre des positions sociales inégales !

Sans aller aussi loin dans l'utopie, on peut en tirer l'idée suivante : la justice est difficile à déterminer, mais on peut en revanche mettre en place assez facilement des dispositifs de justice qui permettent de la déterminer au cas par cas. Et au fond, la négociation elle-même n'est rien d'autre qu'un tel dispositif.

Le système idéal n'est pas celui qui a les lois idéales, mais celui dont la constitution rend les lois inutiles, car chaque acteur est poussé à agir justement.

Ainsi il suffirait presque que le tribunal soit sagement constitué pour se passer de toute loi et de la pénible prolifération juridique actuelle.

Transparence

Voici une proposition concrète, piquée à Obama :

Publier régulièrement les comptes de l'Etat pour rendre compte de chaque sou dépensé.

Du droit de licencier

J'ai trouvé le point où la bêtise de la gauche culmine : c'est sur la question de l'interdiction de licencier.

Je tiens en effet une telle interdiction pour le comble de la stupidité. Interdire le licenciement, c'est bien la manière la plus superficielle, fausse et hypocrite de résoudre le problème du chômage. Et surtout ce n'est pas du tout une manière de le résoudre.

Pourquoi, tant qu'on y est, ne pas OBLIGER chaque entreprise à embaucher une personne de plus ? Ainsi le problème du chômage serait résolu.

Une manière de voir les choses m'amuse particulièrement : contre qui protège-t-on un salarié si on interdit son licenciement ? Eh bien, contre le travailleur mieux qualifié et actuellement sans emploi qui le remplacerait. Interdire le licenciement, c'est protéger un travailleur peu efficace (et donc inutilement coûteux pour la société, notamment pour le consommateur) contre un chômeur qui pourrait le remplacer.

Certes, mon argument est un peu faux. Il ne vaut que si on suppose que le travailleur sera remplacé. Mais c'est déjà le cas bien souvent. Ainsi le statut protégé des profs aboutit à protéger des incapables contre des gens bien plus aptes.

Et j'ajouterai que même si le travailleur ne sera pas remplacé, il faut tout de même le licencier. Car il vaut mieux un chômeur plutôt qu'un travail inefficace (sans parler de toutes les nuisances occasionnées par cette loi hypocrite : harcèlement, mauvaises relations entre travailleurs, etc.). C'est une question de justice et de clarté : soit il y a un travail à faire, et la personne la plus qualifiée le fait ; soit il n'y a rien à faire, et dans ce cas autant regarder les choses en face et être au chômage. Non seulement pour une question de vérité et de clarté, mais aussi pour des raisons d'efficacité économique et de justice : pourquoi faire payer à cette entreprise, c'est-à-dire à ses clients, le coût de ce travailleur inutile ? Pour la punir d'avoir embauché au préalable ?

Il faut donc regarder les choses en face et supprimer les emplois inutiles. Dans le privé, le consommateur y gagnera ; dans le public, le contribuable y gagnera. L'argent ainsi économisé pourra d'ailleurs être investi pour quelque chose d'utile. Concrètement : remplaçons les fonctionnaires par des ordinateurs partout où c'est possible ; les gains permettront de créer des emplois dans la recherche et ailleurs.

Little Brother

On parle beaucoup de "Big Brother"... Mais pour l'instant, c'est plutôt Little Brother : un effet non négligeable des nouvelles technologies, et de la multiplication des appareils d'enregistrement (vidéo notamment) à portée de main, est la "surveillance"... de la police elle-même ! Manifestations, passages à tabac, etc. : de nombreuses bavures policières, en tout cas celles réalisées en pleine rue, sont de plus en plus souvent enregistrées par de simples citoyens, ce qui mène parfois jusqu'à la condamnation de la police par la justice !

Dernier exemple en date : le flic new-yorkais ayant bousculé un manifestant à vélo :

Dette de l'Etat

Pour ou contre la dette publique ? Tout dépend quelle dette, et quand.

Quelle dette : investissement ou dépenses de fonctionnement.

Quand : en période de crise ou en période de croissance.

La dette n'est justifiée que dans les premiers cas : en période difficile, et pour des dépenses d'investissement.

Si la dette est détenue par l'étranger (cas des Etats-Unis), elle peut ensuite être diminuée par une dévaluation (baisse du cours de la monnaie nationale) : alors la dette, dont le montant nominal ne change pas, vaut beaucoup moins en termes réels.

Si ce sont les nationaux qui détiennent la dette, il ne faudrait pas croire que la dette est purement neutre, et que l'argent de nos impôts qui en paye les intérêts est compensé par les recettes financières (taux d'intérêt reçus) des créanciers de l'Etat. Car ce ne sont pas les mêmes ! L'impôt est réparti sur toute la population (un peu moins sur les pauvres selon le type d'impôt) tandis que la dette ne rapporte de l'argent qu'aux créanciers, c'est-à-dire aux plus riches (à ceux qui ont pu prêter à l'Etat).

Notons que l'Etat est un emprunteur (presque) comme un autre, de sorte que s'il n'inspire pas confiance il devra payer plus cher pour pouvoir s'endetter. Une gestion rigoureuse lui permet de s'endetter à moindre coût.

Pour information en 2007 les Français paient, uniquement pour payer les intérêts de la dette (sans parler de la rembourser), environ 40 Mds d'euros, soit l'équivalent de ce que rapporte l'impôt sur le revenu.

Travail le dimanche

Pour ou contre le travail du dimanche ?

- C'est la tradition (argument de GAUCHE !), c'est notre culture française
* Justement, le monde entier travaille le dimanche, il faut se moderniser et faire pareil
- Cela n'augmente ni la croissance ni l'emploi : cela déplace seulement le travail et les dépenses, sans les accroître, de la semaine vers le dimanche
- Cela nuit au petit commerce
* Cela n'est pas un argument : pourquoi défendre le petit commerce ? La grande distribution coûte moins cher (rappel : notre but n'est pas de "créer du travail" mais de le rendre inutile)
* Les jeunes ont envie de faciliter le dimanche, ça facilite les choses pour ceux qui étudient
- Si nous admettons que le but est de travailler le moins possible et le plus efficacement possible, alors il vaut sans doute mieux se mettre d'accord pour ne pas travailler le dimanche : un peu comme si on se mettait d'accord pour ne plus faire de publicité, nous y gagnerons tous (une bagnole pour laquelle on n'a pas fait de pub est une bagnole moins chère !)

Que changera, concrètement, cette mesure ? Ca facilitera et ça simplifiera la vie. Certains employés seront peut-être contraints de bosser le dimanche. De sorte que ceux qui y rechignent seront remplacés par ceux qui sont prêts à cela. Les conséquences en termes d'écologie ne sont pas claires : d'un côté en répartissant l'activité sur 7 jours on la facilite (moins d'embouteillages, etc.).

Pour répondre à cette question en termes écologiques, ce qui devrait être l'argument décisif, il faudrait faire une étude précise des conséquences qu'auraient l'autorisation du travail le dimanche...

C'est triste à dire mais c'est vrai qu'en ville le dimanche c'est mort et triste. Ce qui veut dire que notre vie se réduit aujourd'hui à la sphère marchande !

Enfin... Moi j'dis ça j'dis rien.

Le plan de relance

Faut-il relancer par la consommation (gauche) ou par l'investissement (droite) ?

Sarkozy a choisi, dans son plan de relance de 26 Mds d'euros, de privilégier l'investissement.

Voici quelques arguments en présence :

* La relance par la consommation a échoué en 1982
- Mais à cette époque la France était la seule à relancer, contrairement à aujourd'hui
- De plus les Français achèteront des biens de base (pain, pâtes), donc l'argent distribué n'ira pas aux Chinois (comme il était allé aux Allemands en 82)
* Mais l'investissement est durable, il produit de la croissance ; alors que l'argent donné aux pauvres ne rapporte rien, il disparaît
* De plus stimuler l'investissement stimule la demande, par le biais des salaires distribués à ceux qui travaillent sur les travaux engagés ; alors que la stimulation de la demande n'entraîne pas mécaniquement une hausse de l'investissement
- Il faut "deux jambes" pour avancer : il faut stimuler à la fois l'investissement et la demande

De toute façon, ce plan est une goutte d'eau (26 Mds, ou plus exactement 3 Mds si on considère que ce plan ne consiste qu'à avancer des investissements prévus, donc le véritable apport de l'Etat ne s'élève qu'au montant des intérêts) face à l'ampleur de la crise (les USA ont déjà investi 7 000 Mds de dollars) : de sorte qu'il faut s'attendre, dans quelques mois, à un nouveau plan de relance d'un ordre de grandeur dix fois plus grand (selon Jacques Attali).

Elections américaines

Bravo ! Vive l'Amérique. On n'entend plus que cette blague : "J'ai une baraque aux Bahamas !"

Mais quelles seront les conséquences de cette élection ?

Les conséquences politiques seront celles, classiques, qui découlent de la victoire du parti démocrate. C'est surtout au niveau symbolique que ces élections changent quelque chose, aussi bien pour les minorités que pour les relations internationales.

Pour les minorités : désormais chaque noir du monde peut se dire : Le président des Etats-Unis est noir. Désormais tout est possible, car tout semble possible.

Pour les relations internationales : mieux que toutes les campagnes marketing de l'administration Bush, la couleur de peau du président devrait changer l'image de l'Amérique quand celui-ci ira discuter avec les Irakiens, les Africains ou les peuples du Moyen-Orient. On ne verra plus, comme à travers un Bush ou un Clinton, l'Amérique WASP ; on pourra voir, dans cette nouvelle Amérique, jeune et multiculturelle, un ami plutôt qu'un ennemi.

Avec Obama, la rhétorique anti-américaine sera un peu plus acrobatique qu'avant.

Les Valeurs Sacrées De La République

Dernière mode : il faut éduquer les immigrés aux valeurs de la France. Dernière convulsion de la politique et de la philosophie de l'"intégration" : il faudrait apprendre à tout ceux dont la peau n'est pas très claire le sens de la Glorieuse Marseillaise (rappelez-vous : "qu'un sang impur abreuve nos sillons", tra la la). Les éduquer, les pauvres indigènes qui ignorent la Culture Française. Leur apprendre le Vrai, le Beau, le Bien, et surtout la Patrie.

Cette politique suscite un profond sentiment de dégoût. Il y a une violence profonde à vouloir ainsi "éduquer". Insupportable. On essaye d'attaquer la liberté de pensée et de conscience elle-même ! Comble de stupidité et de vanité. Une nauséabonde impression de ridicule s'en dégage. Ridicule, car voué à l'échec : on n'impose pas les idées, on ne règne pas sur les coeurs. Nauséabond, car l'idée même est abjecte et ignoble. Un pays où on enseigne des valeurs d'Etat n'est pas un pays libre.

"Intégration", voilà notre nouveau concept de guerre, cuirasse hypocrite de notre intolérance. Voilà ce qu'est devenu l'héritage resplendissant des Lumières ! Ô paradoxe ! Ironie de l'histoire ! Ô laideur des grandes idées, quand elles se recroquevillent et font apparaître leur fond crasseux.

La France ne séduit plus, alors on oblige les gens à faire semblant de l'aimer. Quelle farce puante ! Quelle hypocrisie ! Qu'est donc devenu ce pays ? Quelle faiblesse, quelle misère !

C'était la même chose pour le voile : on n'aime pas l'islam, alors on en interdit les manifestations, les symptômes, sous couvert de prétextes hypocrites, odieux et auxquels personne ne croit, sauf les plus fieffés hypocrites qui parviennent à se duper eux-mêmes à force d'idéologie.

Pourquoi une politique aussi absurde fonctionne ? Quel est le modèle alternatif ? En fait, la question ne se pose même pas. Nul besoin de "modèle alternatif" : car l'idée même de vouloir décider d'une politique à cet égard est abjecte. Il n'y a rien à dire ici. Circulez, messieurs les gendrames, il n'y a rien à voir. Les opinions, les valeurs, les idées, les sentiments des citoyens ne sont pas du ressort de l'Etat. Seuls les actes peuvent faire l'objet d'une loi.

La politique française de l'intégration et la philosophie qui la sous-tend sont vaines et ridicules, car elles s'attaquent à une chose qui n'est pas en leur pouvoir : la liberté de pensée, la conscience, les valeurs.

Cette politique et cette philosophie sont aussi abjectes et ignobles, car elles s'attaquent à une chose sur laquelle elles n'ont aucune droit. Elles prétendent s'immiscer dans ce qu'il y a de plus intime et de plus personnel. Elles visent au fond à modifier nos pensées, nos valeurs, nos idées. Rien n'est plus haïssable.

Les âmes et les coeurs ne sont pas du ressort de la loi.

La liberté de penser est inaliénable - aux deux sens du terme.

Prix du pétrole et pouvoir d'achat

Le prix du pétrole est trop bas. Notre pouvoir d'achat est trop élevé.

Le prix du pétrole doit encore monter, et notre pouvoir d'achat doit encore descendre.

Tout simplement parce que le prix du pétrole ne reflète pas son coût, notamment son coût environnemental, qui est énorme. Pendant longtemps nous avons eu un pouvoir d'achat artificiellement élevé parce que nous n'intégrions pas la pollution dans le prix des choses. Aujourd'hui, cela se fait peu à peu, ce qui se traduit par une baisse inéluctable et nécessaire du pouvoir d'achat.

Tous les arguments qui nient ce fait massif sont démagogique.

La seule politique courageuse serait de taxer encore le pétrole, afin d'accélérer la transition vers des énergies plus propres. Une taxe carbone est le moyen le plus simple et le plus efficace d'obtenir les effets désirables en matière d'écologie : car le coût écologique est alors transmis par ricochet à tous les produits dont la production nécessite du pétrole.

Les pêcheurs, transporteurs et autres n'ont qu'à répercuter ce surcoût dans leurs tarifs. Il est bon, souhaitable et écologiquement nécessaire que ces métiers, tels qu'ils sont pratiqués aujourd'hui, disparaissent rapidement.

Tout va bien

La vérité suprêmement choquante et politiquement incorrecte, aujourd'hui est celle-ci : Tout va bien, tout n'est jamais allé aussi bien. Faites l'expérience : dites ça à des amis, et vous verrez les réactions horrifiées. On est tellement habitués à se plaindre qu'on ne voit plus une vérité aussi simple et évidente.

C'est-à-dire que les conditions de vie, la richesse, le pouvoir d'achat, n'ont quasi cessé d'augmenter depuis quelques siècles, y compris pour les plus pauvres, s'il vous plaît. Depuis la "crise" économique (1975), la richesse de la France a plus que doublé.

Cela dit, il ne faut nullement croire que cette amélioration de la situation (aux niveaux social, économique, géopolitique, etc.) se traduit par une augmentation du "niveau moyen de bonheur". Celui-ci, pour autant qu'un tel concept ait un sens scientifique, reste probablement constant au cours du temps. Car le bonheur, comme toute sensation, est essentiellement différentiel. Nous ne sentons que les différences. Aucun état ne rend heureux (ni malheureux) durablement, car on s'habitue à tout. Seule une amélioration de notre situation (une augmentation de notre puissance, pour le dire dans le langage de Spinoza, qui, en définissant les affects comme des variations de notre puissance, avait fait du caractère différentiel la définition du sentiment) procure un certain bonheur provisoire.

Ainsi pour connaître de grandes joies il faut de grands malheurs (pas de montagne sans vallée), et par conséquent l'époque actuelle, où tout coulisse avec davantage de fluidité chaque jour, se caractérise plutôt par l'ennui que par le bonheur. Tout s'aplatit et tend vers zéro dans le monde "parfait" et bien réglé.

Ici comme ailleurs la technique met l'homme face à lui-même, elle lui fait découvrir sa nature et sa volonté profonde ; et il découvre avec stupéfaction que ce qu'il voulait, ce n'était pas le confort mais le jeu, voire la guerre...

Histoire d'un prof

C'est l'histoire d'un prof qui défend activement ses droits. Il participe chaque semaine à des réunions, des grèves, des manifestations, des discussions entre collègues et entre amis, à défendre ses droits, ses acquis sociaux. En particulier, il est opposé à l'idée de faire des heures supplémentaires, car il considère qu'il a déjà trop de travail et de fatigue. Il ne veut pas faire une heure supplémentaire par semaine. Alors il s'oppose à la réforme du gouvernement, qui ouvre la voie aux heures supplémentaires. Et il discute, il débat, il manifeste, bref il passe environ huit heures par semaine à dire qu'il ne veut pas en faire une de plus.

Plus généralement, si on additionne le temps passé par les Français à râler, à se plaindre et à gémir, le résultat est si colossal que l'objet de leurs plaintes, en comparaison, semble bien ridicule. La seule hypothèse permettant de comprendre des phénomènes aussi paradoxaux, c'est que les Français aiment se plaindre. Quand un ami se plaint, il ne faut pas ressentir de compassion, mais au contraire comprendre qu'il est en train de jouir, de se masturber en quelque sorte. Alors, laissons-le faire, mais ne l'écoutons pas.

Le rappel à l'ordre

Y a plus de morale - dit-on depuis que l'on sait parler.

Alors certains veulent un retour à la morale. Mai 68 serait allé trop loin.

Le problème n'est pas moral. La morale, ça ne change pas. Ce qui est susceptible de changer est d'ordre collectif et non individuel, sociologique et non moral.

Le problème n'est pas moral : ceux qui souhaitent un retour à l'ordre moral sont à côté de la plaque. Ce qui est peut-être allé trop loin, c'est un certain discours selon lequel tout nous serait dû, selon lequel la société aurait des devoirs envers l'individu. On naîtrait avec notre flopée de droits, comme une pile de dossiers sous le bras.

Il y a peut-être une part de vrai dans ce discours. On peut peut-être admettre que la société a des devoirs envers l'individu. Mais la mentalité du "tout nous est dû" est pernicieuse. A force d'avoir des droits dès notre plus jeune âge, on a tendance à oublier que tout droit suppose un devoir, que toute aide financière a un coût (donc des gens, quelque part, qui travaillent pour le payer).

Du point de vue moral, rien ne nous est dû. Nous ne pouvons rien exiger. Nous devrions être reconnaissants pour tout ce que la société nous donne.

La solution n'est pas un retour à la morale (expression d'ailleurs dépourvue de sens). Il faudrait plutôt mettre fin à l'infantilisation de gauche. La droite ne doit pas ouvrir la bouche, mais la gauche doit la fermer.

Féminisme

Il y a deux féminismes : un féminisme idiot, qui veut identifier la femme à l'homme, et un autre, moins sot, qui revendique l'égalité mais non l'identité.

Ce qu'on appelle "émancipation de la femme" se présente comme son aliénation suprême. Les femmes "émancipées" sont celles qui ont renoncé au mode de vie féminin traditionnel pour se soumettre au mode de vie "masculin", que ce soit dans les domaines économiques (travail rémunéré), sexuels ou autre. L'émancipation de la femme désigne en réalité sa soumission suprême aux valeurs masculines. S'émanciper signifie devenir un homme.

Il y aurait pourtant une femme à inventer. Mais ce n'est pas mon problème.

Croissance

La croissance n'est pas un objectif politique. Si elle était parfaitement mesurée (i.e., si une augmentation du nombre d'accidents ou de maladies ne contribuait pas à la "croissance"), elle pourrait l'être, à condition que l'on considère que s'enrichir est un objectif politique.

Mais la décroissance n'est pas non plus un objectif politique. Car la croissance (telle qu'elle est mesurée) n'implique pas plus le gaspillage que l'augmentation du bien-être. Autrement dit, elle n'est ni "toute bonne" ni "toute mauvaise". Elle est hybride : une part de gaspillage et de pollution, mais aussi une part d'amélioration réelle.

Exemples : les accidents de voiture entraînent de l'activité économique (hôpital, réparations, etc.) donc contribuent à la croissance. L'augmentation de la consommation en matières premières et énergies fossiles aussi (car on ne comptabilise pas, dans le bilan de la richesse créée, la richesse détruite par le fait de consommer ces ressources naturelles). Les progrès informatiques (et, de manière plus générale, les inventions techniques qui permettent de polluer et travailler moins) contribuent à la croissance, sans avoir d'effets négatifs.

De manière plus générale, et purement économique, tous les raisonnements qui visent à résoudre les problèmes (chômage, etc.) par la croissance sont superficiels et à courte vue. Car la justice (économique, sociale, etc.) n'est pas une question de volume. L'idée keynésienne, consistant à résoudre le problème du chômage par la relance de la demande et de la croissance, fonctionne peut-être, mais ce n'est pas l'horizon absolu de la pensée économique. Il viendra un jour où il faudra songer, face au chômage, non pas à produire davantage, mais plus simplement à assurer le partage du travail existant entre ceux qui veulent travailler.

Bref, l'équité du partage ne dépend pas de la taille du gâteau. Certains pensent que si le gâteau est mal partagé il faut le faire grossir. Ou bien ils sont à côté de la plaque, ou bien c'est parce qu'ils ont la grosse part et ne veulent pas en céder une partie aux autres qu'ils tiennent un discours si absurde. Les réponses keynésiennes au chômage sont à courte vue.

Objectif : détruire des emplois

On dit : "Il faut créer des emplois." Formule trompeuse. Il faut détruire des emplois. Le but n'est pas de travailler. On ne travaille que parce que cela permet d'obtenir des choses : argent, bouffe, bagnoles, maisons, femmes, etc. Pour éviter toute ambiguïté il faut donc corriger : le but est de détruire le travail (c'est-à-dire diminuer la quantité de travail nécessaire), mais aussi de partager le travail restant de manière équitable. C'est le sens qu'a (ou devrait avoir) la formule "créer des emplois".

Conclusion : la destruction du travail humain (caissières remplacées par des automates, fonctionnaires par des ordinateurs, agriculteurs par des tracteurs) est une bénédiction (toutes choses égales par ailleurs, bien entendu). Tous les boulots sont à détruire, et en priorité les boulots de merde.